Les trois décisions majeures auxquelles n’échapperont pas les organisateurs de salons
À côté des décisions cosmétiques que prennent les organisateurs de salon en matière de RSE, il y a peut-être des ruptures plus conséquentes à envisager. Et un changement de comportement pour les rendre possibles.
Alors que les portes de beaucoup de salons de rentrée se ferment sur un succès, à l’instar du récent salon Produrable et ses 11.000 visiteurs – un record -, l’importance des événements qui placent la rencontre live au cœur de leur stratégie n’est plus à démontrer. Le genre humain aime se rassembler, confronter ses idées, faire du business et s’inspirer en vrai. Et c’est tant mieux. Maintenant, tout le monde sait que des efforts sont à fournir. En premier lieu les organisateurs, qui sont face à trois décisions majeures :
Renoncer (ou pas) à certains formats traditionnels
Un salon dont l’attractivité et la résonance sont mondiales a-t-il toujours vocation aujourd’hui à se tenir en un seul et même lieu, à l’heure d’une recherche quasi généralisée d’agilité vers la sobriété ? Certaines traversées de la planète ne sont-elles pas évitables lorsqu’elles ne sont dédiées qu’à assister à une conférence ou un atelier, à visiter un stand ou chercher une inspiration, quand on sait que les transports représentent très souvent plus des trois quarts de la consommation carbone d’un événement ? Ne peut-on pas imaginer de régionaliser, de se rapprocher de ses visiteurs ? Quelques organisateurs l’ont compris en développant leur marque sur d’autres continents, pays ou villes, une stratégie initiale de développement, mais en phase avec les objectifs de transition écologique. Art Basel, par exemple, la célèbre foire d’art contemporain et moderne, s’est développé à Hong-Kong pour mieux couvrir l’Asie et le Sud- Est asiatique, à Miami autour des galeries des États-Unis, d’Amérique Centrale et d’Amérique Latine, et prochainement à Paris, avec Paris+ by Art Basel. Le Sial, le salon du secteur de l’alimentation, possède un réseau de 14 déclinaisons dans 14 destinations différentes.
Faire preuve (ou pas) d’audace, voire de courage
Avant-hier, on parlait de ROI d’un événement, pour retour sur investissement. Mon salon est-il rentable économiquement, en termes de rencontres, d’échanges ou de business générés ? Hier, est venu s’ajouter le ROE, le retour sur émotion. Ai-je organisé un rendez-vous qui satisfait mes exposants et mes visiteurs, qui suscitent l’envie d’y revenir et qui génère une expérience forte ? Ces deux premiers indicateurs clés de performance sont évidemment essentiels. Mais la puissance de l’événement dépend aujourd’hui d’un troisième KPI, qu’on doit avoir le courage de poser comme tel : le ROC ou retour sur carbone. La valeur ajoutée de mon salon, en termes de retombées business ou émotionnelles, a-t-elle été produite sans que j’explose ma consommation de carbone ? Comment créer de la valeur en diminuant mon impact ? L’audace, c’est d’intégrer cette démarche carbone à tout le processus de conception et de production l’événement. Je mesure mon empreinte, je trouve les solutions pour la diminuer et je compense ce qui ne peut pas l’être à court terme.
Innover (ou pas)
Pour viser le zéro net carbone, objectif ultime que tout événement devrait se poser, sans renier bien sûr leurs valeurs fondatrices, les organisateurs de salons ont une arme de construction massive : l’innovation, ou comment trouver les solutions utiles pour diminuer mes impacts. Ce travail au long cours peut être mené avec l’ensemble des parties prenantes, qui, chacune, regorge à coup sûr d’idées plus structurantes les unes que les autres. L’innovation sera concrète si elle inclut tout le monde : collaborateurs et fournisseurs, mais aussi exposants et visiteurs. La sobriété est une affaire de travail en commun, d’échanges et de partage. Non seulement, les innovations doivent répondre aux besoins des exposants, des visiteurs et, dans le cadre des événements BtoB, du secteur dans son intégralité, mais elles doivent toucher également les formats et les contenus. Et là, il y a un peu de boulot d’imagination…, d’innovation !
Dans les salons, on peut l’affirmer, la prise de conscience qu’un nouveau comportement doit désormais prévaloir est présente. Le mouvement de sobriété a même commencé. Reste à l’accélérer, en faisant la promotion des nécessaires renoncement, audace et innovation !
Béatrice Eastham
(Texte publié dans La Gazette des Salons)